Interview Vidéo du Grand Maître Jon Ludvig Hammer

Pour commencer, peux-tu te présenter ?

Je suis Jon Ludwig Hammer, j’ai 24 ans, bientôt 25, je suis Norvégien.

Quand et comment es-tu entré dans le monde des échecs ?

Ah oui ! Etant enfant, mon mère a offert un échiquier à mon père pour Noël et je me suis intéressé aux échecs et à l’apprentissage des règles. A tel point que j’ai commencé à suivre des cours d’échecs après l’école. Et donc je me suis très bien débrouillé lors de ces cours d’échecs, j’ai donc commencé à jouer dans un club et à participer à des tournois avec d’autres enfants. Donc oui… J’ai plutôt bien réussi et ça m’a beaucoup plu. Une chose en amenant une autre… et voilà !

Tu es le secondant de Magnus Carlsen, peux-tu nous expliquer à quoi cela ressemble ?

C’est… Magnus est une très grande star en Norvège, et faire partie de son équipe à la fois quand il a gagné le championnat du monde en 2013 et quand il a défendu son titre l’année dernière… Eh bien c’est simplement un grand honneur et c’est aussi vraiment fun d’en faire partie, de pouvoir dire aux gens que oui… ! On essaye de l’aider autant qu’on le peut. Et au niveau des échecs, je pense que c’est différent que d’être le secondant d’Anand par exemple, parce que Magnus essaye juste  d’obtenir une position…. Il sait qu’il est un très bon joueur d’échecs, donc le principal objectif est d’obtenir une position que l’adversaire n’aura pas analysée avec son ordinateur dans le but de jouer une partie où deux adversaires s’affrontent personnellement et non une partie où les deux joueurs se basent sur les analyses de l’ordinateur au lieu de réfléchir eux-mêmes.

Qu’est-ce que tu apprécies dans le fait d’être le secondant du champion du monde ?

Eh bien… faire partie de l’histoire qu’est Magnus, je pense que c’est vraiment cool et ce sera quelque chose auquel je repenserai plus tard. Et puis, en Norvège Magnus est une immense star aujourd’hui, faire partie de son équipe, l’aider à devenir champion du monde et à garder son titre, je pense que c’est le meilleur travail que l’on puisse faire !

Préfères-tu jouer pour toi-même ou bien être le secondant d’un autre joueur tel que Magnus ? Et pourquoi ?

Je préfère sans aucun doute être le secondant, et c’est principalement parce que jouer soi-même est extrêmement stressant, et je pense que n’importe quel joueur d’échecs vous le dira. J’adore les échecs, mais je pense vraiment qu’analyser est moins stressant que de jouer des parties dans un tournoi et de devoir prendre des décisions sans avoir l’ordinateur pour t’aider. Parce qu’en tant que secondant vous avez ce fantastique assistant qui est l’ordinateur, donc jouer par soi-même c’est juste plus dur.

Tu viens de gagner de gagner l’Entercard Chess Qualifer où tu t’es qualifié pour le tournoi du Norway Chess, peux-tu nous parler de ton tournoi et de tes résultats ?

Mes résultats ont été géniaux ! Je suis extrêmement content de m’être qualifié pour le tournoi du Norway Chess. C’était un combat entre deux joueurs, c’était moi et Laurent Fressinet. Et je pense que nous aurions tous les deux mérité de remporter le tournoi. Tout s’est joué lors de notre match en rapide, ça a été la différence. C’était une partie très intéressante,  c’était très compétitif, très compliqué. Laurent avait une bonne attaque, il a obtenu une position gagnante et j’ai eu de la chance. Mais avec cette cadence, il nous restait très peu de temps à tous les deux, ce qui est propice à faire des erreurs et il a fait une énorme faute… et parfois, il faut juste savoir prendre sa chance. Et j’ai eu une chance énorme quand il a fait son erreur, et je l’ai donc saisie et voilà. Bon peut-être pas mérité mais je suis super content d’avoir gagné un match si stressant avec autant d’enjeux.

Comment appréhendes-tu le tournoi du Norway Chess et comment vas-tu t’y préparer ?

Eh bien je vais compter sur ma préparation pour les qualifications, je veux dire il ne reste plus que trois semaines avant le début du tournoi. Donc je vais juste essayer de me détendre. Je pense que pour jouer les meilleurs joueurs du monde, il y a une part de psychologie là-dedans. Je l’ai sous-estimée la dernière fois que j’ai joué. Je veux juste réfléchir à ce que j’ai fait la dernière fois, ce que j’ai mal fait et améliorer cela maintenant que j’ai obtenu une seconde chance.

Quels sont tes objectifs pour ce tournoi ?

J’aimerais gagner une partie mais je pense que j’ai décidé que mon objectif serait de faire environ trois points, ce qui me permettra de doubler mon score de la dernière fois. Et je veux aussi jouer mon propre jeu, je ne veux pas avoir peur des meilleurs joueurs au point de changer ma façon de jouer. Je veux croire en mes propres qualités et essayer de gagner de cette manière-là. Parce que je pense que la dernière fois, j’ai essayé de jouer beaucoup de choses forcées, beaucoup de lignes théoriques pour être sûr que d’une manière ou d’une autre mon adversaire  veuille l’éviter pour ne pas que je joue trop de coups théoriques et j’ai essayé de jouer plutôt de manière agressive parce que je voulais que… simplement la dernière fois mon premier objectif était de gagner une partie et je ne jouais pas vraiment en fonction de mon style. Donc cette fois-ci, je veux croire en mes propres qualités et à mon niveau, j’essaie en général de manœuvrer et de surpasser mon adversaire et cette fois je veux avoir assez de conviction en mes propres capacités pour même essayer de surpasser les meilleurs joueurs du monde.

De manière générale, quels sont tes objectifs à court et long termes ?

A court terme, je veux rester dans le Top100 pour un long moment. J’ai eu une tendance à jouer de très mauvais tournois… mon niveau maximum est très bon mais parfois je fais de très mauvais tournois et ça affecte énormément mon classement et cela fait monter et descendre mon niveau comme un yo-yo. Et donc mon objectif à court terme est de ne pas quitter le Top100 et mon objectif à long terme, je veux être un meilleur joueur d’échecs et atteindre les 2700.

Quelle est ta partie favorite que tu as jouée au cours de ta carrière et pourquoi ?

Euh… C’est une bonne question, laisse-moi y réfléchir et je t’enverrai un message après.

Mes parties préférées sont Hammer-Ivanchuk 1-0 en 2010, Anand-Hammer 0-1 en 2013, et Gunnarsson-Hammer 0-1 en 2010.

Admires-tu ou es-tu inspiré par un joueur d’échecs en particulier ? Si oui, pourquoi ?

Eh bien, je pense que je suis très inspiré par Magnus. Nous avons étudié dans le même lycée qui combinait à la fois l’école et le jeu d’échecs. Le voir devenir le numéro un mondial, l’avoir dans ma classe expliquer ses parties, et voir que les meilleurs joueurs n’étaient pas si extraordinaires et se dire que si Magnus pouvait les battre, peut-être que nous le pouvions aussi... Je pense qu’une bonne partie de mon style de jeu a été influencé par le succès de Magnus. Donc j’ai été inspiré par son succès, et je pense que vous pouvez voir dans mon style que j’ai essayé de reproduire certaines façons de jouer de Magnus.

Quels sont tes livres d’échecs préférés ?

En général j’aime les livres de Jonathan Rowson et de Mihail Marin donc je dirais que mes livres préférés sont :  « Learn from the Legends » de Marin et « Seven deadly chess sins » de Rowson.

Quels sont tes pires et meilleurs souvenirs aux échecs ?

Je pense que mon meilleur souvenir doit être… j’ai remporté la médaille d’argent au premier échiquier lors des championnats d’Europe par équipes en 2009. C’était plutôt important pour moi. Et le pire… eh bien, 1,5 point sur 9 au Norway Chess en 2013 me vient à l’esprit. C’était sûrement le plus petit nombre de points que j’ai jamais marqué après être devenu grand-maître. Mais j’espère prendre ma revanche cette année.

En dehors des échecs, qu’aimes-tu particulièrement faire ?

J’aime particulièrement jouer au football.

Pour terminer, tu vas jouer le Norway chess dans quelques semaines mais as-tu d’autres plans pour les semaines/mois à venir ?

Oui, cet été je vais jouer au Danemark dans la Politiken Cup.

Merci beaucoup d’avoir répondu à nos questions !